Porcelette aujourd’hui

Les 400 ans de Procelette.

Extraits du livre de l’abbé N. BAROTH : « Porcelette, cité du Warndt »

Naissance du village

Fondation

Le village de Porcelette n’a pas surgi spontanément et grandi progressivement autour d’un noyau attractif, comme le furent par exemple, le monastère de Longeville, le château de Varsberg et la verrerie de Creutzwald. C’est un village de défrichement, édifié méthodiquement sur un emplacement choisi et délimité.

Il doit son origine à la poussée démographique que connurent la Lorraine et toute la France depuis la seconde moitié du XVIe siècle jusqu’à la guerre de Trente Ans. La population excédentaire avait besoin d’essaimer vers de nouvelles terres pour se nourrir. Les seigneurs, possesseurs de forêts, trouvaient leur avantage à en céder une partie pour l’essartage et la mise en culture car ces nouvelles terres leur procuraient un revenu supérieur.

C’est ainsi que, dans notre région, une série de villages furent fondés à partir de 1570, au terme de contrats passés entre le seigneur foncier et les défricheurs. Le mouvement s’accéléra à l’époque qui, en France, est celle du roi Henri IV et de la « poule au pot ». Dans la proche région naissent tour à tour les villages de Redlach en 1607, Henriville en 1608, Valette en 1609. L’année suivante, celle de la mort de Henri IV, poignardé par Ravaillac, l’abbé commendataire de Saint Nabor, Mgr Jean des Porcelets, décide à son tour de créer un nouveau village, sur une requête présentée par un groupe de personnes de la Mairie de Boucheporn, curé, maire et échevins en tête.

Comme le record de justice de 1518 lui reconnaissant le droit d’essartage, l’abbé se passa de l’avis des seigneurs qui se partageaient alors les droits d’avouerie, ceux de Kerpen, de Dagstuhl et de Créhange. Le seigneur de Kerpen en fut averti le premier, le 4 novembre 1610, par l’ancien maire, Clesgen, de Bisten. Il alerta aussitôt les co-seigneurs, mais la réunion qu’ils avaient projeté de tenir à Denting n’eut pas lieu. Le seigneur de Kerpen s’adressa alors en vue d’un arbitrage à Christophe de Créhange, frère de Pierre-Ernest, bailli d’Allemagne à Vaudrevange, mais sans résultat.

En 1611, le 14 septembre, jour de l’Exaltation de la Sainte-Croix, assisté du prieur de Saint-Michel et de Saint-Mihiel, du prieur et des sept religieux de Saint Nabor, « congrès et assemblés au son de la cloche », Mgr des Porcelets signe le contrat portant fondation d’un nouveau village que s’engagent à ériger les personnes présentes et nommément désignées. Ce village doit être érigé dans la forêt de « KRIENWALD », dans « une contrée appelée « NECKERSTIL » et portera le nom de « LA PORCELETTE, à la PORCELETTE-VILLERS ».

Suivant l’habitude de l’époque, l’abbé ne s’est pas lancé dans une aventure sans garanties préalables. Aussi, au lieu de faire directement appel aux amateurs voulant s’établir dans le nouveau village, a-t-il préféré traiter avec un groupe de promoteurs, qui s’engagent « conjointement et sans division » à mener à terme l’implantation du village et qui ont les moyens de satisfaire à ses conditions. Parmi eux figurent les notabilités de la Mairie de Boucheporn et deux riches bourgeois de Saint-Avold qui ne songeaient certainement pas à quitter leur domicile. Pour eux, c’était plutôt une occasion d’investir quelque argent. En comparant les noms de ces initiateurs avec ceux des habitants de 1621, on se rend bien compte, que l’association revendait ou louait les différents lots de la concession. On manque de précisions sur les modalités, mais on peut facilement imaginer qu’on devait engager des défricheurs et vendre la propriété clefs en main et plus souvent sans doute, vendre le lot brut ou aménagé en partie seulement.

En 1621, le village comptant déjà 55 bourgeois, ceux-ci ont adressé, le 30 octobre 1621, une pétition à Mgr des Porcelets pour obtenir le droit d’essarter, une nouvelle partie du Krienwald, au lieu-dit « Marbergue », alias Marckberg. Le produit du bois devait couvrir les frais de construction d’une église. Le 14 septembre 1621, l’abbé, se référant à la charte de 1611, qu’il confirme ainsi, signe cette charte comme complément à la première.

Ruine et relèvement

Ce village encore neuf et en pleine expansion subit, pendant la guerre de Trente Ans, le sort de tous les villages environnants. Mais il est déjà trop important et trop bien implanté pour pouvoir disparaître définitivement. Il lui faudra un siècle pour se relever. Mais c’était le sort commun de toutes les localités.

Selon les déclarations des habitants de 1722, le village de Porcelette ne comptait plus que « deux ou trois » habitants, en 1635. Les autres s’étaient réfugiés dans les forêts ou dans une région plus sûre. Ils n’étaient pas nombreux à survivre, mais sans doute plus nombreux qu’on ne le suppose habituellement. En 1641, comme partout ailleurs quelques rescapés ont dû revenir et, les misères recommençant, repartir déçus. Eux-mêmes ou leurs descendants ont attendu alors un temps où la paix était mieux garantie, après 1661, par exemple. Ainsi la reconstruction, le repeuplement et la réorganisation s’est-elle réalisée par étapes, timidement et lentement d’abord et avec plus de vigueur après le traité de Ryswick, en 1697.

En 1722, il y avait 45 familles. Leur nombre s’accroît de jour en jour et « ils bâtissent continuellement des maisons ».

La reconstruction ne se termina en réalité que bien plus tard, lorsque toutes les restaurations provisoires auront été remplacées par des bâtiments complètement nouveaux. Bien des édifices publics, comme les églises seront à reconstruire vers 1750, entre autres celle de Porcelette.

La seigneurie de Porcelette

Depuis la fondation du village jusqu’à la Révolution française, la seigneurie de Porcelette appartenait à l’abbé de Saint Nabor, soit à l’abbé régulièrement élu par la communauté des religieux, soit le cas échéant, à l’abbé commendataire. L’abbé de Saint Nabor est seigneur foncier, haut, moyen et bas justicier, patron et décimateur de la seigneurie de Boucheporn et de celle de Porcelette.

Les plaids annaux

L’abbé a le droit de les tenir quand bon lui semble. Nous en possédons les procès-verbaux pour 1751 et les années 1758 à 1789.

Les revenus fonciers

Les propriétaires devaient au seigneur, comme « dîmage et terrage », la 7e gerbe, selon le contrat de 1611. Après les bouleversements de la guerre, en 1694, les laboureurs déclarent livrer un cens perpétuel de six poules, deux chapons, deux quartes d’avoine et deux francs. Cela représentait le double de la taxe sur les maisons. On a dû revenir aux anciennes impositions, car en 1697, la redevance est ramenée de la 7e à la 9e gerbe parce que le seigneur n’assurait pas la présence d’un curé résident comme il était convenu. À partir de 1750, la dîme étant attribuée au curé désormais résidentiel, les propriétaires du ban avaient consenti, par contrat du 17 novembre 1751, de remettre tous les ans, à la Saint Martin, 12 quartes et 2 bichets, moitié seigle, moitié avoine, au grenier du seigneur.

À ces redevances, il faut ajouter le droit de glandée qui s’élevait à 6 gros par porc et par saison et tous les bénéfices que laissait aux seigneurs l’exploitation de la forêt.

Les banalités

On appelle ainsi l’obligation pour les habitants de recourir exclusivement à certains services seigneuriaux. La plus connue d’entre elles est la banalité du moulin. D’après la charte de 1611, les habitants de Porcelette étaient assujettis à la banalité du moulin de DIZAIN (Diesen). Ils devaient y apporter leurs grains et si, après un délai de 24 heures, la mouture n’était pas encore effectuée, ils avaient le droit de les reprendre et de se rendre au moulin de leur choix. De son côté, le meunier était obligé de les servir, de préférence aux clients non banaux. Les infractions étaient sanctionnées par la confiscation des biens, le versement de dommages intérêts au meunier et une amende arbitraire.

La charte n’indique pas le prix de la mouture, mais le meunier de 1816, Jos. Frache se réfère encore au contrat (peut-être particulier) de 1611, pour justifier son prix, soit 1/16° des grains et 1 foural supplémentaire de son, si on le fait remoudre.

Le maire seigneurial

Le maire ou mayeur de la communauté est nommé par l’abbé ou son représentant, au cours des plaids annaux. Son mandat est d’un an seulement, mais il est renouvelable. Le maire est généralement choisi parmi les grands propriétaires, si bien que la charge devient pratiquement le monopole des familles Wagner ou Chérier, Muller, Rouy et Grandidier.

Le maire a un rôle de juge. Avec les gens de justice, il juge les délits champêtres, après avoir reçu le rapport des bangardes et des experts pour l’estimation des dommages. Il tient le rôle des troupeaux. Il est aussi le receveur de l’abbé et doit lui faire parvenir le montant des amendes, des cens et des redevances . On le voit aussi surveiller les abornements dont il doit signer les procès-verbaux. Il présente les requêtes au nom de la communauté.

Somme toute, il est l’intermédiaire entre le seigneur et la communauté. Membre de cette communauté et appelé à rentrer dans le rang, il se solidarise volontiers avec les habitants face au seigneur. En 1463, le maire de Boucheporn avait même été mis en prison par le seigneur-abbé lui-même. Celui de 1730 était accusé de négligence dans la perception des droits et menacé de représailles.

Le moulin de Porcelette (état actuel)

Les temps modernes

Les débuts de la Révolution furent assez paisibles sur le plan local. D’après les registres paroissiaux, un incendie, survenu le 6 juin 1791, aurait détruit les archives. On ne connaît pas l’ampleur exacte de ce sinistre ni son origine. Durant la Révolution, le village faisait partie du district de Sarrelouis qui prit le nom de Sarrelibre. Il dépendait tour à tour du canton de Bérus (1790), de Bisten en Sarre (1795), de Sarrelouis (1802), de Bouzonville en 1815. C’est en 1829 qu’il fut définitivement rattaché au canton de Saint-Avold, avec Diesen comme annexe depuis 1811.

La Municipalité semble avoir été assez modérée au début, mais par la suite, elle entra dans le jeu révolutionnaire et mit un zèle tout particulier à exécuter les consignes. Jean-François Couturier, syndic de la municipalité, devenu juge de Paix du canton de Bisten, était sous l’influence de son frère, Jean-Pierre Couturier, un fervent révolutionnaire. Il était aussi appuyé par son ami Georges Nïmesgern, d’une famille établie depuis peu au moulin, préposé à la Police du commerce extérieur de Bisten ( douanier ) et de son frère Jean Nimesgern de Diesen.

L’exode rural au XIXe siècle

Entre 1825 et 1830, de nombreux habitants, pour échapper à la misère, partent vers des centres plus prospères, vers la capitale surtout. Ce mouvement d’émigration s’est arrêté, non pas que les conditions de vie se fussent améliorées au village; mais par temps de crise généralisée, on ne trouvait nulle part des moyens d’existence meilleurs.

Le renouveau économique des débuts du Second Empire n’a pas apporté la prospérité à domicile. Les petites industries de la région ne peuvent pas satisfaire toutes les demandes d’emploi. D’autre part, l’extraction de la houille ne débute que lentement à Carling en 1860. L’émigration reste donc la seule solution. Il est vrai qu’il faut aller loin, jusqu’à Paris qui se développe et où le baron Haussmann entreprend de grands travaux. Mais le voyage se trouve facilité à partir de 1851, quand la ville de Saint-Avold est reliée à la capitale par le nouveau chemin de fer.

Le mouvement d’émigration reprend précisément à cette époque. Entre 1851 et 1856, c’est un véritable exode. En 1851, la municipalité se plaint de ce que la localité « se dépeuple d’une manière effrayante ». En 1854, elle constate que « la misère fait émigrer une très forte partie des malheureux ». En effet, le chiffre de population, en dépit d’un accroissement naturel considérable, tombe brutalement de 1314 en 1851 à 1189 en 1856, et il reste encore « un grand nombre de malheu¬reux ».

Tous ces émigrants déferlent sur la capitale et la région parisienne qui est aussi la plaque tournante vers l’Amérique et les Colonies. Elle sera plus tard une nouvelle fois la région d’accueil pour la vague d’émigration qui a suivi l’annexion de 1870.

Les compatriotes déjà implantés sur les lieux appellent souvent leurs proches et leurs amis et les aident à trouver du travail et un gîte. Ils restent groupés autant que possible, surtout dans le XIIIe arrondissement. On retrouve, par exemple, au moins trois familles dans la petite rue Pinel. Ils s’intègrent au groupe de Lorrains de dialecte qui sont si nombreux qu’on leur fait des offices religieux en allemand jusque vers 1900.

Les trois guerres

La guerre de 1870

À la déclaration de guerre, les fonctions de maire étaient remplies à Porcelette par Pierre Ney, un homme tout dévoué à l’Empire. Il avait fait voter une adresse à l’empereur Napoléon, lors du complot de 1865 et une autre à l’occasion de l’attentat de 1867. L’arrivée des Allemands est douloureusement ressentie par lui comme par ses administrés. Les vainqueurs réquisitionnent du bétail en grand nombre. Des voituriers sont convoqués à Saint-Avold et comme certains ne répondent pas à l’appel, la commune est frappée d’une amende de 500 F.

Le mandat de Pierre Ney n’est pas renouvelé aux élections du 13 août 1871. On a porté à la mairie Henri Genvot (Genevaux) qui venait de perdre son fils, mort au camp de prisonniers de Marienburg, à l’âge de 18 ans. Il décline la charge après n’avoir présidé que deux séances du conseil municipal et à sa propre demande il est relevé de ses fonctions pour raison de santé. Son successeur, Nicolas Lambert, n’apprécie pas davantage sa fonction. Il se fait régulièrement remplacer par l’adjoint, Muller, jusqu’au moment où l’administration allemande nomme d’office un nouveau maire en la personne de M. Dorr, au mois d’août 1873. Les conseillers lui en veulent sans doute d’avoir la faveur des Allemands et d’exercer son mandat sans réticence. C’est peut-être pour cette raison qu’ils lui créent des ennuis en le dénonçant pour mauvaise gestion. Les conseillers de Diesen lui restent fidèle. Il est cependant maintenu et confirmé dans ses fonctions aux élections de 1875. Les maires suivants se sont succédés à une cadence rapide, à quelques exceptions près.

La germanisation comportait aussi le renvoi du personnel enseignant. En 1872, le « Hauptlehrer » Kraus remplace le directeur d’école Bailly qui avait continué à rédiger les procès-verbaux des délibérations du conseil municipal en français et à partir d’août 1872 seulement en allemand, mais un allemand approximatif. Les sœurs enseignantes de Peltre ont dû céder la place au personnel laïque dans la ligne du Kulturkampf de Bismark.

La possibilité d’opter pour la France en quittant le territoire et le souci des jeunes d’échapper à l’enrôlement dans l’armée allemande donnent une nouvelle impulsion à l’exode vers la région parisienne. Mais à partir de 1890, c’est la « belle époque » partout, en Allemagne comme en France. Au niveau du village, elle se manifeste avec moins d’éclat, mais elle est sensible. Les gros cultivateurs vivent dans l’aisance. Le petit cultivateur et le journalier,sans ambition et sans prétention arrivent à vivre eux-aussi. Le mineur-paysan, lui, travaille très dur pour améliorer sa situation.

L’église de Porcelette reconstruite de 1885 à 1887 à l’emplacement d’un édifice de 1622 qui, en 1756 et en 1847, avait été agrandi. C’est une église de type halle, de style néo-gothique. La tour-clocher actuelle date de la reconstruction de 1847.

La guerre de 1914-1918

Lorsqu’elle éclate, elle provoque la consternation. On est loin d’éprouver l’enthousiasme qui se manifestait à Paris. Connaissant mieux les Allemands pour les avoir longtemps côtoyés, on savait que la partie serait dure. Ces quatre années de guerre sont meurtrières, les enfants de la commune tombent nombreux. La première victime est le jeune maître auxilaire de l’école des petits, tué déjà le 18 août 1914 Au mois de septembre, il y a 5 victimes et la liste s’allonge et atteindra le nombre de 35. Les enfants sont obligés de célébrer les nombreuses « victoires » allemandes qui leur valent souvent des congés. À l’école de filles, l’institutrice, patriote allemande très zélée, arrive à émouvoir jusqu’aux larmes son naïf auditoire, remis à la raison, au retour de l’école, par les remarques narquoises des parents : « Ils vaincront à en mourir ».

La guerre de 1939-1945

Deux jours avant la déclaration de guerre, les habitants de Porcelette doivent évacuer la localité, située entre la ligne Maginot et la frontière allemande. On ne peut emporter comme bagage que le strict nécessaire. Un long cortège de voitures, attelées de chevaux ou de vaches, et une file de piétons et de cyclistes se mettent en route vers Pont-à-Mousson. Parti vers 15 heures, dans l’après-midi du 1er septembre, on atteint BambiderstrofF et Haute-Vigneulles en fin de soirée. Après une nuit passée à la belle étoile ou dans les granges, la marche reprend vers Rémilly où l’on rencontre les premières troupes. La deuxième halte se fait à Villers-Stoncourt. Les fugitifs, dont le nombre a été grossi par des colonnes venues de Carling et de L’Hôpital, vont camper dans un grand pré attenant au village. Le lendemain, ordre est donné d’abandonner les véhicules et le bétail; et des cars viennent charger les « évacués » pour les répartir dans les villages autour de Pont-à-Mousson en attendant de pouvoir prendre le train à Dieulouard. Il serait trop long de raconter les péripéties de ce voyage en wagons à bestiaux, roulant jour et nuit pendant 48 heures, vers une destination inconnue. Ce n’est qu’au dernier arrêt qu’on apprenait quelle était la région d’accueil.

Les bassins houillers de la Loire et celui du Pas-de-Calais permettaient le réemploi des ouvriers mineurs lorrains. Quant aux familles ne comprenant aucun ouvrier mineur, elles furent débarquées à Vi-vonne, dans la Vienne. C’était là qu’était repliée la majeure partie de la population avec les services administratifs., l’autorité civile et religieuse. Beaucoup de familles étaient ainsi dispersées,et il a fallu des mois pour retrouver le contact. La vie des réfugiés ressemblait à celle de tant d’autres. Après l’effondrement de la France, la plupart d’entre eux tinrent à rentrer au pays pour sauver ce qui pouvait encore subsister de leurs biens. Hélas, 22 maisons étaient détruites, dans la rue de Diesen, par l’explosion, au début de la guerre, d’un puits miné qui devait barrer la route. Un grand nombre d’autres maisons étaient endommagées et habitables en partie seulement. Hélas, ces maisons du no man’s land, avaient été pillées à fond.

Au mois de novembre 1944, à l’approche des Américains, des obus sont tombés sur le village, endommageant quelques maisons. Aucun mal n’est arrivé aux habitants, terrés dans leurs caves, heureux de n’avoir pas été évacués de force, ce qui aurait provoqué une situation tragique pour les « insoumis ». On avait, en effet, menacé d’anéantir le village, avec les réfractaires qui s’y cachaient. Les Américains arrivèrent le 27 novembre 1944, suivis de près par les Français qui mirent en place une délégation municipale pour y rétablir la vie normale.

Les mineurs

Ce village, conçu d’abord en vue d’une fonction exclusivement agricole, va être complètement bouleversé par l’irruption de l’industrie.

Le fer.

L’industrie du fer s’était déjà introduite au XVIIIe siècle dans la région avoisinante. Les registres paroissiaux attribuent pour la première fois la profession de mineur en 1761 à trois hommes de Diesen, Georges Hanewald, Jean-Adam Gabriel et Louis Muller. Il existait à cette époque « un fourneau » à Creutzwald; le duc de Lorraine avait délivré une concession en 1759. Celle-ci fut renouvelée en 1823 par ordonnance royale, ayant comme assise géographique les territoires de Creutzwald et de Porcelette. On signale en 1830 comme maître-mineur, Jean-Baptiste Mick et comme mineurs, Jean Bour et Etienne Mitsch, et en 1840, P. Mick. Le minerai consiste en grès ferrugineux assez pauvre et d’un traitement difficile. Par endroit on le trouve en surface, sous forme de petits conglomérés lourds ressemblant à la fonte que les mineurs allaient glaner. Le nom de la colline du fer , « isenhiwel » et son étagement en terrasses témoignent de son exploitation. En 1839, on signale aussi l’extraction de minerai de fer de carrières ouvertes dans la forêt. Cette activité s’est ralentie très rapidement et a complètement cessé à Creutzwald, dès 1861, car elle ne pouvait plus supporter la concurrence de la minette lorraine.

Le charbon.

Dans la prévôté lorraine de Schaumburg (région de Tholey, aujourd’hui sarroise), quelques veines de charbon avaient été découvertes en 1730. Le charbon de Griesborn était exploité en 1772. Mais il faudra attendre l’année 1856, pour remonter au jour la première tonne de charbon lorrain, au Puits Saint Charles, à Petite-Rosselle; tandis que dans les environs immédiats, à Carling, le premier bloc ne fut sorti qu’en 1862 et promené triomphalement à Sarreguemines et à Metz, aux cris de « Vive la Houille ! ».

Un certain nombre d’hommes jeunes quitèrent alors la localité pour se fixer dans les nouveaux centres miniers. Les plus hardis allèrent jusque dans les mines de fer ou les usines métallurgiques du pays de Thionville, surtout à Moyeuvre et à Rombas, parce que leses salaires y étaient plus élevés.

La plupart de ceux qui ne voulaient pas se déraciner avaient des biens dont ils ne voulaient pas perdre le bénéfice. Ce sont eux, en tout premier lieu, qui méritent l’appellation de « mineurs-paysans ». Il serait plus logique de les appeler “paysans-mineurs”. En effet, ce type de mineur reste paysan et rêve d’une exploitation familiale agrandie et améliorée. Ses préoccupations de paysan le suivent à la mine. Durant son absence, sa femme et ses enfants se chargent de tous les travaux, à part ceux qui sont réservés aux hommes, comme la fauche et les labours. C’est lui-même qui les fera à son retour de la mine, ou avant d’y aller, en empiétant, s’il le faut, sur ses heures de repos. Le vélo et bientôt l’autobus lui permettront de gagner du temps qui sera bien utilisé. Désormais la mine fait partie de la vie d’une bonne partie des habitants de Porcelette et la lampe du mineur apparaît sur le blason du village.

Le “mineur-paysan” garde donc une âme de paysan. Il juge de sa situation par référence au laboureur du village. Il ne se sent pas encore solidaire de la classe ouvrière. Son travail mixte lui permet de parvenir à une certaine aisance, ce qui lui donne l’impression d’être d’une classe supérieure à celle de l’ouvrier proprement dit. I1 n’a pas beaucoup d’esprit revendicatif, il n’est pas très fervent syndicaliste. Le syndicat lui paraît utile surtout pour régler des difficultés qu’il pourrait rencontrer personnellement.

Au “mineur-paysan” succède par la suite un mineur qui en conserve quelques caractères et qui garde sa mentalité propre. Il ne s’identifie pas avec l’ouvrier des centres miniers et des cités-dortoirs. Il garde l’habitude de l’alternance, mais ne s’impose plus de travail excessif. Il se contente de cultiver son jardin et parfois un champ de pommes de terre. Il s’occupe volontiers d’arboriculture qui est pour lui une distraction bien plus qu’une source de rapport.

Dans les années 1950, l’expansion des Houillères du bassin de Lorraine, puis la création de la plate-forme chimique à Carling, apportent la prospérité. Avec la construction de plusieurs lotissements, le village devient une cité résidentielle recherchée.

La rue de Saint-Avold et le centre du village

Quel avenir ?

Au XXe siècle, c’est le charbon qui a apporté le développement économique et la prospérité à Porcelette. Mais aujourd’hui les puits de mine sont tous fermés, des entreprises ferment ou licencient. La récession est là. La redynamisation viendra de nouvelles implantations industrielles et, dans ce domaine, Porcelette ne manque pas d’atouts. Depuis le 1er septembre 2004, date de sa création, Porcelette fait partie de la Communauté de Communes du Pays Naborien avec Altviller, Carling, Diesen, Folshviller, L’Hôpital, Lachambre, Macheren, Saint-Avold et Valmont. Ensemble, toutes ces communes ne se contenteront pas de regarder vers le futur mais sont bien décidées à le construire. Inauguré le 15 novembre 2010, le “Composite Park” est un bel exemple de cette détermination. Située sur l’ancien site minier De Vernejoul, cette zone est appelée à accueillir des entreprises innovantes dans les domaines de la plasturgie, des matériaux composites à hautes performances et des énergies nouvelles.