La basilique Notre-Dame de Bon-Secours

Sans commune mesure avec le majestueux édifice d’aujourd’hui, le premier oratoire élevé en ce lieu était une modeste chapelle édifiée au XVIe siècle par les moines bénédictins de l’abbaye Saint-Nabor et déjà dédiée à la Vierge Marie. À la fin du XVIIe siècle, cette petite chapelle fut reconstruite selon les plans d’ingénieurs de Vauban, occupés de 1680 à 1686 à l’édification des fortifications de Sarrelouis. Le nouveau sanctuaire devint rapidement un lieu de pèlerinage réputé vers lequel affluèrent de toutes parts des fidèles en recherche de réconfort auprès de la Vierge, en ces temps difficiles. La chapelle fut ensuite détruite par des révolutionnaires naboriens, au cours de la campagne de déchristianisation de 1794. Des fidèles continuèrent cependant de venir prier sur ses ruines, malgré les interdits formels.

Sitôt le culte rétabli, la chapelle fut reconstruite par des habitants de la ville et des environs. Le 5 août 1806, le curé archiprêtre de Saint-Avold, Jean Nicolas Houllé (1750-1841), obtint de l’évêque de Metz l’autorisation de bénir le lieu de prière reconstitué et d’y transporter en procession la statue sauvegardée de la Vierge. L’afflux des fidèles reprit alors sa progression et rapidement la chapelle s’avéra inadaptée au succès du pèlerinage.

Cette situation amena l’archiprêtre Georges Auguste Lemire (1838-1922) à entreprendre la construction d’un lieu de prière plus vaste. La pose de la première pierre eut lieu le lundi de Pentecôte, 26 mai 1890, en présence de plus de 3000 personnes venues en procession. Construite en un temps record, la nouvelle chapelle, placée sous le vocable de Notre-Dame de Bon-Secours, fut bénie le 11 octobre 1890 par l’évêque de Metz, François-Louis Fleck (1824-1899), ancien curé de Valmont (1860-1863). La cérémonie, d’une solennité particulière, dura toute la journée et réunit plus de 5000 personnes.

Toutefois, dans l’esprit de l’entreprenant archiprêtre, ce ne devait être là qu’une première étape. Dès 1897 en effet, Georges Auguste Lemire engagea la seconde phase de son ambitieux projet portant sur l’adjonction d’une imposante construction de plan centré octogonal, couverte d’un majestueux dôme, à l’image de celui de la basilique Saint-Pierre de Rome. La bénédiction de l’édifice achevé eut lieu le 11 octobre 1902, douze années exactement après la première cérémonie. L’immense succès que connut ensuite le pèlerinage de Notre-Dame de Bon-Secours valut au sanctuaire d’être élevé au rang de basilique mineure, le 31 août 1932, par le pape Pie XI.

Près de trente années plus tard, l’archiprêtre Georges Klein (1905-2003) entreprit la construction, à quelques pas de la basilique, d’un grand centre de récollection, complément indispensable de ce haut lieu de vie spirituelle. Ainsi naquit le Foyer Notre-Dame, inauguré le 27 mai 1962 par le nonce apostolique Paolo Bertoli, sur l’invitation de l’évêque de Metz, Paul-Joseph Schmitt (1911-1987).

La basilique et son environnement.

Georges Auguste Lemire avait voulu créer un sanctuaire dédié à la Vierge Marie, à la hauteur de son grand attachement au culte marial, avec l’objectif clairement affiché de le voir rapidement élevé au rang de basilique. À cet effet, il avait fait appel au réputé architecte messin Rémy Jacquemin (1844-1906), pour en établir les plans. L’abbé Lemire se trouvait cependant confronté à la difficulté majeure du financement de cet ambitieux projet. Décidé certes à puiser abondamment dans ses fonds personnels, il lui fallait néanmoins compter sur le résultat des nombreuses collectes qu’il entendait organiser dans un large périmètre autour de Saint-Avold. Il reçut heureusement des aides substantielles de la part de prêtres notamment. Le projet fut ainsi réalisé en deux étapes, que l’archiprêtre finança entièrement. La première tranche correspond à la chapelle bénie le 11 octobre 1890. Édifiée en forme de croix latine, elle était formée d’une abside polygonale, d’un transept et d’une nef de trois travées. Conformément à la tradition chrétienne, son chœur est orienté, le soleil levant évoquant l’image du Christ lumière. À la croisée du transept s’élevait un petit campanile qui avait reçu deux cloches fondues à Metz en 1890, par Louis Bour et André Guenser. Le campanile fut supprimé dans les années 1950 pour cause de stabilité douteuse.

La seconde tranche, engagée en 1897, a donné naissance à la grande construction de plan centré octogonal, destinée à abriter le chœur principal du sanctuaire. Sa base, d’où se dégage un second transept, est prolongée par un tambour à seize pans, surmonté d’un dôme monumental. Les lucarnes de ce dernier sont ornées alternativement de globes et de croix, évoquant la rencontre des hommes avec Dieu. Le lanternon du sommet porte la croix de Lorraine qui culmine à 33 mètres au-dessus du sol du vaisseau. La façade occidentale de l’édifice est formée de deux tours carrées encadrant la grande statue baroque de la Vierge, œuvre du Namurois Pierre François le Roy (1739-1812). Elle provient de l’ancien portail classique de la cathédrale de Metz, démonté en 1898.

Afin de rendre l’ensemble harmonieux, la chapelle primitive fut sensiblement modifiée : les voûtes de la deuxième et de la troisième travées furent rehaussées et l’on ajouta deux tours ouvertes sur la nef. L’aménagement du lieu fut parachevé par l’archiprêtre Georges Klein. En 1950, il fit de la crypte un lieu de prière accessible à tous, puis il créa aux côtés de la « grotte de Lourdes », en place depuis 1891, la vaste esplanade destinée aux célébrations en plein air. En 1962, le foyer Notre-Dame, clé de voûte de l’ensemble, entra en fonction. La municipalité de Saint-Avold a rendu hommage à ce prêtre, le 11 septembre 2010, en nommant cette esplanade « Espace Georges-Klein », événement marqué par l’érection d’une stèle en son honneur.

Sur le plan stylistique, l’église est globalement d’inspiration romane, voire ottonienne avec ses deux chœurs et ses quatre tours, tout en présentant des éléments gothiques et baroques ainsi qu’un imposant dôme Renaissance. Cet ensemble composite s’inscrit dans le courant de l’éclectisme en vogue à la fin du XIXe siècle.

L’intérieur de la basilique.

Le chœur primitif.

En pénétrant dans le sanctuaire par l’entrée sud, le visiteur découvre à sa droite le chœur primitif. La statue de Notre-Dame de Bon-Secours, la Vierge auxiliatrice, abritée sous son élégant dais, domine l’espace. Elle est entourée de vitraux représentant sainte Anne avec sa fille Marie, et saint Joseph. Le couvrement de ce chœur est fait d’une voûte d’ogives à cinq quartiers rayonnants et un quartier longitudinal.

Le transept primitif.

Il comportait à l’origine deux autels dessinés par Rémy Jacquemin et dédiés, l’un à la Sainte Famille, l’autre aux quatorze saints auxiliaires (ou auxiliateurs). Ces autels furent éliminés dans les années 1960. Seuls demeurent aujourd’hui des fragments de leurs retables respectifs. L’icône de la Vierge de Czestochowa est, depuis le 25 mai 2006, placée face au relief de la Sainte Famille.

Le chœur principal.

La nef de la chapelle primitive s’ouvre sur le grand volume de plan octogonal centré qui abrite le chœur principal. Il est délimité par huit solides colonnes cylindriques coiffées d’austères chapiteaux romans sur lesquels s’appuient des arcs discrètement brisés qui supportent le tambour et la coupole. La monotonie des colonnes est rompue à mi-hauteur par des motifs cubiques décorés des anciennes armoiries de Saint-Avold et de celles de huit autres villes de Moselle. Deux de ces colonnes supportent les insignes des basiliques : l’ombrelle et la clochette. Cette configuration, avec son déambulatoire octogonal, est en réalité une modeste réplique de la chapelle palatine d’Aix-la-Chapelle, joyau de l’art carolingien. Alors que l’autel actuel est placé de façon centrée, celui de 1902, dessiné par Jacquemin, était situé côté occidental, en avant de l’orgue. Il était ainsi entouré des vitraux de la Nativité et de la Crucifixion, qui évoquent respectivement l’Incarnation et la Résurrection. À ce chœur est associé le second transept de l’édifice, lequel comportait deux autels, dédiés respectivement à sainte Thérèse (côté nord) et à saint Louis de Gonzague (côté sud). Ils furent supprimés dans les années 1960.

L’orgue.

Logé dans l’arcade occidentale du chœur principal, l’orgue actuel fut réalisé en 1949 par le facteur Haerpfer-Erman de Boulay. Il a remplacé le magnifique instrument au buffet baroque dont la construction remontait à 1721, semble-t-il. Acquis à Trèves en 1804 par la paroisse messine de Saint-Eucaire, cet orgue avait été vendu à la fabrique de Saint-Avold en 1902. Monté par le facteur Staud de Puttelange, il fut inauguré le 24 mai 1907, jour de la fête de Notre-Dame de Bon-Secours. Quelque peu détérioré à l’issue de la dernière guerre, il disparut en 1949 sans laisser de trace.

Les croix de Lorraine.

L’édifice en compte vingt-sept : dix sur les colonnes du chœur principal et dix-sept à l’extérieur. De toute évidence, l’abbé Lemire entendait par là exprimer discrètement son opposition au pouvoir wilhelminien, pendant cette période du Reichsland (1871-1918).

La crypte.

Lieu de célébration et de recueillement depuis 1950, la crypte réunit plus de 350 ex-voto, sous la forme de plaquettes de marbre, déposées par des pèlerins au fil des ans, le plus souvent en remerciement à la Vierge Marie pour des grâces obtenues.

Les vitraux

Les vitraux de la basilique sont constitués d’œuvres typiques de la fin du XIXe siècle, issus des ateliers de trois maîtres verriers de renom. Ils présentent aussi la particularité d’être les plus anciens vitraux de Saint-Avold. La richesse et la diversité de leurs coloris, ainsi que les messages spirituels qu’ils délivrent, confèrent à ce sanctuaire lumineux un caractère particulièrement propice au recueillement.

Le chœur et le transept

primitifs reçurent en 1890 des vitraux du Nancéien Victor Höner (1840-1896). Ceux du chœur représentent Marie avec sa mère, sainte Anne, et saint Joseph. Dans le transept figurent sainte Catherine et sainte Barbe, côté nord, ainsi que saint Alphonse de Liguori et saint François d’Assise, côté sud.

La nef

de la chapelle primitive est ornée des vitraux réalisés en 1900 et 1901 par Michel-Frédéric Thiria (1867-1939), éminent maître verrier messin. Ceux de la première travée présentent sainte Chrétienne et saint Louis, roi de France. Les vitraux des tours de la seconde travée montrent sainte Agnès et saint Augustin, ainsi que sainte Élisabeth de Hongrie et saint Nicolas. La troisième travée est ornée d’invocations des litanies de la Vierge. Côté sud, Mater Afflictorum (Mère des Affligés) évoque la Consolatrice des Affligés, vénérée en la cathédrale de Luxembourg.

Le chœur principal,

sous la coupole, comporte six verrières qui évoquent la Nativité et la Crucifixion ainsi que des personnages connus pour leur grande vénération de la Vierge Marie : sainte Thérèse, sainte Bernadette, saint Dominique et saint Louis de Gonzague. Posées vers 1927, ces verrières proviennent de l’entreprise munichoise de Franz Xaver Zettler, la célèbre Königliche Bayerische Hofglasmalerei F. X. Zettler.

La crypte

est éclairée, côté sud, par le vitrail en arc de cercle évoquant « La femme et le dragon » de l’Apocalypse de Jean (12), réalisé en 1986 par Bruno Altmayer.

Les vitraux :

  • à gauche : la crucifixion,
  • à droite : Sainte Anne.

Georges Auguste Lemire.

Né à Bouzonville le 8 octobre 1838, il fut ordonné prêtre en la cathédrale de Metz, le 14 août 1864, par Mgr Dupont des Loges. Vicaire à Saint-Maximin de Metz, curé de Manderen, puis de Villing, il fut nommé curé archiprêtre de Saint-Avold, le 17 novembre 1880. Il créa la chapelle des Sept Douleurs de l’ancienne église abbatiale et édifia cette basilique. Atteint de cécité, il fut contraint de quitter ses fonctions en 1906. Administrateur à vie du sanctuaire de Notre-Dame de Bon-Secours, il s’est éteint à Saint-Avold, le 14 juin 1922. Il est inhumé dans la chapelle funéraire qu’il avait fait édifier à quelques pas de sa basilique.

Georges Klein.

Né à Spicheren le 5 octobre 1905, il fut ordonné prêtre en la cathédrale de Metz, en juillet 1931, par Mgr Pelt. Il fut successivement vicaire à Forbach, desservant de Tritteling puis de Val-de-Guéblange. Expulsé par les nazis en 1941, il retrouva sa paroisse en 1944. Nommé curé archiprêtre de Saint-Avold le 18 mai 1946, il fut l’artisan de la reconstruction de la paroisse et de la restauration de ses églises dévastées. II créa le Foyer Notre-Dame en 1962. Chanoine titulaire de la cathédrale de Metz, recteur de la basilique de 1962 à 1969, prélat de sa Sainteté, vicaire général, Mgr Klein est décédé à Saint-Avold, le 11 janvier 2003. Il est inhumé dans son village natal de Spicheren.

Pascal Flaus, archiviste de la Ville André Pichler, Société d’Histoire du Pays Naborien Photos : © André Pichler