Un bel édifice de la fin du Moyen Âge : la chapelle Sainte-Croix de Saint-Avold.
par Pascal Flaus (extraits de l’article paru dans le numéro 23 du Cahier du Pays naborien)
La chapelle Sainte-Croix, située à l’angle de la rue du général Mangin et du passage des Poilus, de style gothique flamboyant, est de nos jours le monument religieux le plus ancien de la ville. Cette chapelle est entourée de mystère, car nous ne connaissons ni la date exacte de sa construction, ni le nom de celui qui l’a réalisée. Elle était à l’origine située non loin de l’ancienne porte de Hombourg, qui commande une entrée majeure dans la cité. Elle était aussi, avec le moulin aux épices (Würtzmühl), bâti vers 1450, le seul édifice en dehors du mur oriental de la ville. Il est d’ailleurs étonnant qu’elle ait pu résister à toutes les guerres, plus particulièrement celle de Trente Ans qui ruina une grande partie de la ville et du Pays naborien.
De la légende fondatrice à la réalité du développement urbain au XVe siècle
Une belle légende narre les origines de cette chapelle.
Lors de la septième croisade, un chevalier originaire de Saint-Avold fut fait prisonnier par les Sarrasins. Ceux-ci tentèrent d’ébranler sa foi par des tortures. Mais, au milieu des tourments, alors qu’il s’écriait « Par la vertu de la Croix, ô Seigneur Christ, délivre-moi de tes ennemis et des miens », il vit soudain une croix resplendissante qui portait cette inscription : “In hoc signo “ (C’est par ce signe que tu vaincras). Il s’aperçut alors qu’il était libre de ses chaînes et se trouvait par miracle sur le petit promontoire près de sa ville natale. Il s’empressa d’y faire bâtir en ex-voto une chapelle qu’il dédia à la sainte Croix.
En fait, la construction de cette chapelle vers 1480-1500, bien après la fin des croisades au XIIIe siècle, s’inscrit dans une période faste pour la ville et son avouerie, qui connaissent un développement économique et spirituel remarquable. Il suffit ici de rappeler la création d’un nouvel Hôtel-Dieu par un couple de notables de la ville, Anselm et Elkina van der Linden, le 3 janvier 1427, et sa dotation, grâce aux nombreuses fondations. Enfin, rappelons brièvement que c’est aussi entre 1493 et 1500 qu’est reconstruite l’église paroissiale Saints-Pierre-et-Paul.
Le culte de la sainte Croix qui se développe rapidement depuis les croisades et la perte de la Terre Sainte, semble aussi, en cette fin du Moyen Âge, connaître un regain d’intérêt. Le « comte sauvage du Rhin », Jacob de Salm, fonde une messe le 20 décembre 1518, pour les siens et le repos de leur âme. Il y affecte une rente annuelle et perpétuelle de 80 florins du Rhin, destinée au paiement du prêtre chargé de la messe, du maître d’école et du marguillier. Celle-ci doit être chantée tous les vendredis à 11 heures, en l’église paroissiale, devant l’autel de la mise au tombeau, représentation du Christ souffrant. De plus, Jacob de Salm spécifie que chaque Vendredi saint, la paroisse versera un demi orth (sou) à deux pauvres hères . Il semblerait que cette rente ait été transférée à la chapelle Sainte-Croix nouvellement construite à une date non connue. Par la suite, les archives mentionnent un chapelain, vraisemblablement celui de l’Hôtel-Dieu qui est chargé de dire une messe tous les vendredis. Il perçoit pour cela 32 livres par an.
Non loin de cette chapelle est construite une léproserie, ou Gutleuthhaus, que mentionne le Stadtrecht de la ville. Les messes dites à la chapelle Sainte-Croix ne sont pas toujours dénuées de risques. Ainsi, le 12 avril 1583, le bourgeois Weinacht Reder est contraint de livrer à des soldats français maraudeurs une charretée de pain qu’il transporte à la chapelle où stationne le régiment.
Une dévotion populaire qui se développe à la veille de la guerre de Trente Ans
Pour organiser cette dévotion, les habitants et la paroisse font des donations. Elles servent à payer le chapelain qui dit la messe du vendredi. Il s’agit d’une rente en argent appelée « Heiligencreutzmessenzinss » ( au cens de la sainte Croix) et qui est de 3 florins du Rhin.
Le jour du Vendredi saint, la dévotion à la sainte Croix prend un caractère festif inhabituel. Le 15 avril 1612, Augustinus Kress, moine capucin de Vaudrevange, chapelain de l’Hôtel-Dieu, rassemble les pauvres de la ville et ceux venus de l’extérieur à qui sont exceptionnellement ouvertes les portes de la ville. Après un repas frugal offert par la ville sous les halles de l’Hôtel de ville, composé de poisson, de pois et de soupe à la bière, tous sont conduits à la chapelle où ils assistent à l’office du Chemin de croix en compagnie des bourgeois. Le chapelain leur distribue par la suite deux setiers de blé, provenant de la donation faite à l’Hôtel-Dieu par l’abbé de Saint-Avold, Jean de Trêves, le 20 mai 1583.
À cette époque, la ville entretient une compagnie de cavaliers appelés « Geleidsreuter », et une compagnie de 24 bourgeois armés appelée « Confrérie de Saint-Antoine », chargées toutes deux d’escorter les marchands qui se rendent aux foires. Ces deux compagnies sont également affectées à l’entretien de la chapelle. La Confrérie, qui faisait à l’origine dire sept messes à l’autel de son saint tutélaire à l’église paroissiale, transfère ces cérémonies à la chapelle, pour des raisons qui nous sont inconnues. La ville attribue aussi à cette Confrérie, devenue dans le langage populaire celle des buttiers ou arquebusiers, quatre jardins situés près de la chapelle qui leur servent de lieux d’entraînement. Les lieux-dits affectés à cette compagnie sont désignés comme Buchser ou Armbrustergärten, ainsi nommés en référence au nom populaire de la compagnie. Ils sont parfois acensés à des particuliers. Le produit de ces cens est versé au profit de messes dites à la chapelle. Le duc de Lorraine Charles III dote la compagnie des buttiers ou arquebusiers de statuts propres le 31 mars 1619, sur le modèle de celles de Nancy ou Saint-Nicolas-de-Port. Elle sera chargée du maintien de l’ordre.
Un chemin de croix est aménagé en 1661.
Création d’un ermitage
Les guerres du XVIIe siècle qui ravagent le duché de Lorraine affectent, sans toutefois les interrompre, le bon fonctionnement des institutions municipales. À son retour dans ses états en 1697, le duc Léopold réorganise la carte administrative, judiciaire et militaire du duché de Lorraine libéré de l’occupant français.
Par ordonnance du 25 décembre 1699, il supprime la compagnie des Geleidsreuter et la remplace par une brigade de maréchaussée composée d’un brigadier et de quatre archers . Il maintient celle des buttiers ou arquebusiers qu’il dote de nouveaux statuts, les 23 août 1710, 28 juin 1714 et 1er décembre 1715. Il accorde la somme de 100 francs barrois, l’exemption de la subvention et des corvées à celui qui abat l’oiseau ou « papagay », le jour de la sainte Croix, le 3 mai de chaque année. Joachim Wahl en sera le premier bénéficiaire, en 1715. Il jouira des avantages liés à cet exploit . Cette manifestation se déroule jusqu’à sa suppression à la chapelle Sainte-Croix.
À l’avènement de Stanislas et sous la pression des autorités françaises, la compagnie est supprimée, les jardins sont municipalisés et les revenus y affectés sont récupérés par le domaine. Malgré la suppression de la compagnie à l’origine chargée de l’entretien des lieux, des messes sont néanmoins dites à la chapelle. La ville semble prendre les devants et y affecte un ermite d’origine savoyarde, frère Nicolas, qui y meurt le 16 novembre 1746, âgé de 62 ans.
La chapelle vers 1880
Lors d’une visite canonique, le 4 août 1751, l’archiprêtre en charge de la visite affirme : « il y a une chapelle hors la ville en l’honneur de la sainte Croix, on y célèbre la sainte messe, il y a même six messes fondées pour les six vendredis du temps de carême…et dans les deux autres chapelles on ne célèbre pas la messe ». Les conseillers de ville et les autorités religieuses s’adressent à l’équipe pour y créer un ermitage afin de perpétuer le culte de la sainte Croix et d’entretenir la chapelle. Claude de Saint-Simon, évêque de Metz, approuve la nomination de René Collignon comme premier gardien officiel de la chapelle, le 23 novembre 1758. Dans l’ordonnance, l’autorité épiscopale fixe ses missions : « René Collignon, de bonne vie, mœurs et religion, [est] établi gardien de la chapelle Sainte Croix […] à charge par lui de bien et fidèlement garder la chapelle, de l’entretenir et de l’orner décemment. Il peut faire la quête dans les paroisses de l’archiprêtré pour l’aider à construire la maison de l’ermitage. Après cette construction, il lui est interdit de faire la quête dans la paroisse de Saint-Avold ». Par la suite, cette habitation sera entretenue par la ville. Le passage de Collignon à Saint-Avold est de courte durée, puisque, selon N. P. Gerardy (1715-1793), historien et procureur syndic, il est remplacé par Nicolas Lorrain, de Tritteling, dès le 23 janvier 1759, « autorisé à habiter la maison de ville près de la Belle-Croix et gratuitement en considération des 50 écus par lui donnés pour le rétablissement et l’embellissement de cette chapelle ». Mais les affirmations de Gerardy sont en contradiction avec celles de l’historien Sébastien Leclerc.
Nous ne connaissons pas dans le détail les noms de tous les ermites qui se sont succédé à la chapelle. Leur procédure de nomination nous est mieux connue. Le 17 octobre 1774, le conseil de ville se réunit, car frère Joseph Humbert, établi en qualité d’aide-chapelle, projette de quitter Saint-Avold pour Linsviller. Le procureur du roi demande alors que « la ville pourvoie rapidement à l’occupation de la maison attenante qui est à la ville, et que l’on choisisse une personne de bonne vie, mœurs et religion en état d’y subsister sans être à la charge du public ». Le conseil de ville, sur recommandation du curé et des gens de justice de Saint-Jean-Rohrbach, considérant les « bonnes vies et mœurs de Théobald Klock, ancien laboureur, veuf, sans enfant, le nomme garde chapelle à charge de prendre l’habit d’ermite, de ne pas mendier à Saint-Avold, d’entretenir une maisonnette en bon père de famille, et de faire les quêtes ordonnées chaque semaine pour les pauvres de cette ville. Ladite permission est révocable au bon plaisir des élus de la ville ». Il occupe cette charge jusqu’à son décès le 15 janvier 1788. Il est alors remplacé par Michel Eblinger, né à Ottonville (1728-1794), d’abord ermite à Sainte-Anne près de Grundviller. Il vit à Saint-Avold durant la Révolution. Opposé à la constitution civile du clergé, il est enfermé à la prison de Metz, puis envoyé à Rochefort pour être déporté au-delà des mers. Il est embarqué au printemps 1794 sur le Washington. Il meurt sur les pontons, le 3 juillet de la même année, et est enterré à l’Île-Madame.
Aménagement du cimetière communal de la Belle-croix : 1763-1863
La sépulture des Naboriens, depuis des temps immémoriaux dans et autour de l’église paroissiale Saints-Pierre-et-Paul, pose de graves problèmes d’hygiène. Une épidémie frappe la ville en décembre 1762. Elle sévit encore en janvier et février 1763. Le procureur du Roi Nicolas Pascal Gerardy en attribue les causes, entre autres, aux mauvaises odeurs dégagées par les cadavres entassés sous quelques pieds de terre au cimetière communal du centre ville. Homme des Lumières, il pousse le conseil de ville à agir. Celui-ci, dans une délibération prise le 17 janvier 1763, demande à l’évêque « la translation du cimetière à cause de la contagion à 150 pas de la ville, à la Belle-Croix ». L’évêque réagit promptement et autorise la translation par mandement épiscopal du 20 janvier, à condition qu’il soit bénit et qu’un mur de séparation soit construit rapidement. Après une vaine opposition du curé de la ville, Barthélemy Traize, le nouveau cimetière est béni le 27 janvier 1763 par les vicaires Michel Tabary et Joseph Wagner, en présence des élus et du Père Mathias, capucin du couvent de Listroff.
Le nouveau cimetière s’étend en terrasses au pied de la chapelle occupant l’angle formé par la chaussée qui conduit à la ville et l’ancien chemin de la « schinerkoul », l’actuel passage des Poilus. Il est clos de murs hauts de six pieds sur ses longs côtés (est et ouest), de deux pieds quatre pouces au nord, du côté de l’entrée, tandis qu’une haie vive le délimite au sud, du côté du chevet de la chapelle. Sur la deuxième terrasse, au pied de l’escalier conduisant à la chapelle, se dressent alors trois croix représentant le Christ entouré des deux larrons, aujourd’hui disparues, mais dont on peut se faire une idée grâce aux calvaires de Ligier Richier conservés dans les églises de Briey et Bar-le-Duc.
Pierre tombale de l’abbé Houllé et son épitaphe à l’intérieur de la chapelle
Trop petit, le cimetière est agrandi à plusieurs reprises en 1779 et 1808. À partir de 1840, il ne peut plus accueillir tous les corps. De plus, il est cerné d’habitations, dont la caserne Fabert. Les autorités militaires qui convoitent des terrains pour l’entraînement de la troupe font également pression pour sa suppression. Après discussions et opposition, il est abandonné au profit de celui du Felsberg en 1853. L’ancien cimetière de la Belle-Croix est désaffecté en 1869, au profit de l’armée. Enfin, le 3 juillet 1933, le conseil décide de mettre à prix trois lots de places à bâtir au vieux cimetière, stipulant que la partie de la parcelle du lot n° 1 située devant la chapelle Sainte-Croix, monument classé, ne sera pas surbâtie.
Un des rares monuments funéraires qui subsistent est celui de l’archiprêtre Jean Nicolas Houllé (1750-1841), conservé et déposé contre la chapelle. C’est un grand monument de plan massif, terminé par un fronton triangulaire, encadré d’acrotères, où est représenté un prêtre avec ses attributs sacerdotaux (calice, ciboire, étole). Une inscription encore bien visible à l’intérieur de la chapelle, rappelle le transfert des restes de l’abbé Houllé le 8 août 1889.
De la restauration du culte à son abandon définitif après 1945
À la Révolution, en 1794, la chapelle est vendue au tisserand Joubert, qui y établit deux métiers. À la signature du Concordat, il rend la chapelle à la paroisse.
L’abbé Jean Nicolas Houllé, curé-archiprêtre de 1803 à 1841, y réorganise le culte : des messes sont à nouveau célébrées ; les fidèles s’y rendent lors des processions des Rogations, à la Fête-Dieu, le Vendredi Saint et à toutes les commémorations de la sainte Croix. La chapelle abrite la Dormition de la Vierge, déposée dans ce lieu en 1792, au moment de la désaffectation de l’église paroissiale Saints-Pierre-et-Paul. En 1849, elle reçoit aussi le groupe sculpté reproduisant la scène de la Mise au tombeau du Christ, en provenance de l’ancienne église abbatiale où il retournera en 1887 : ce sépulcre est d’abord installé dans la chapelle Notre-Dame-des-Sept-Douleurs, puis en 1923, après un bref séjour dans la future basilique, à l’emplacement qui est le sien aujourd’hui.
La chapelle vers 1910
Après la mort de Jean Nicolas Houllé, la chapelle est progressivement abandonnée. La disparition du cimetière en 1870 favorise cette situation. Le culte est rétabli grâce à Georges Auguste Lemire, curé-archiprêtre de Saint-Avold de 1880 à 1906, qui entreprend une restauration complète de l’édifice : elle est réalisée par Joseph Orefice (1855-1931) et son fils Jean (1873-1940), maîtres maçons et entrepreneurs, et s’achève par la translation de la dépouille de l’abbé Houllé dans la chapelle qui est bénie en grande pompe par l’archidiacre Muller, le 8 août 1889, en présence d’une foule nombreuse et d’une dizaine de prêtres de la région. Une seconde phase de restauration a lieu en 1937-1938 avec la pose de cinq vitraux de la maison Bohl de Haguenau. Ils comportent un médaillon en souvenir de la Passion. La maison du jardin est restaurée par la même occasion, mais, endommagée par un incendie, elle s’effondre en 1943 et doit être rasée.
Un édifice de style gothique flamboyant
Le bâtiment de plan rectangulaire, orienté nord-ouest sud-est, est un vaisseau à deux travées voûtées d’ogives, de 7,30 m sur 4,50 m de large. La dimension fonctionnelle en nef et chœur ne correspond pas à la dimension de la voûte. Le chœur liturgique est surélevé par une marche à l’arrière de l’arc doubleau. Du côté sud, une construction de plan rectangulaire avec une abside à trois côtés est accolée à la façade, mais son axe n’est pas perpendiculaire à la chapelle.
Le portail frappe par sa largeur et ses contours : c’est une baie dont l’arcature légèrement brisée forme presque un plein-cintre ; les moulures de l’encadrement sont peu accentuées. Une niche, sous le toit, abritait une statue en bois de saint Michel aujourd’hui disparue. Dans les années 1880, l’ancienne croix en bois qui surmontait la porte est placée par l’abbé Lemire à l’église paroissiale et fixée au premier pilier de la nef, côté sud, face à la chaire. Elle disparaît en 1910, lors de la restauration de l’église paroissiale entreprise par l’archiprêtre Dicop. Un crucifix de belle facture, également en bois, l’a remplacée.
Le mobilier ancien de la chapelle a disparu, victime du désintérêt et de pillages dans les années 1970.
L’autel néogothique actuel est installé vers 1890-1900. Sur cet autel était déposée une croix utilisée par le corps des sapeurs-pompiers pour orner, lors de la Fête-Dieu, leur reposoir situé devant la fontaine Saint-Jean-Népomucène. Il remplace un vieil autel Louis XV vendu en 1875 à un notaire naborien en retraite par un conseil de fabrique peu attentif à sa valeur historique. La ville avait entrepris de gros travaux dans l’édifice en 1609. Elle avait chargé Hans Graben de refaire un nouvel autel . C’est au-dessus de cet autel que se trouvait le retable de la Vierge représentant la Dormition aujourd’hui installé dans le collatéral gauche de l’église paroissiale.
Dans une petite niche située à gauche se trouvait avant guerre une antique Pietà. Deux autres niches placées à fleur de terre des deux côtés de l’autel abritaient les statues de sainte Brigitte et de sainte Barbe, patronnes des gens de guerre. Elles ont disparu et ont été remplacées par des statues en plâtre de la fin du XIXe siècle. Ces statues rappellent qu’au Moyen Âge les arbalétriers de la ville avaient leur champ d’exercice près de la chapelle dans laquelle ils faisaient célébrer les messes à leur intention, chaque vendredi, aux quatre-temps et le Vendredi Saint.
Le campanile qui surmonte la toiture renfermait une cloche fondue en 1730, disparue aujourd’hui. Elle portait comme inscription l’invitation suivante : « J’appelle les fidèles à la prière ».
Un monument menacé et abandonné ?
La dévotion populaire régresse dans la première moitié du XXe siècle. La chapelle est vandalisée à plusieurs reprises dans les années 1970. Elle est laissée à l’abandon par le clergé post conciliaire et cédée en 1966 par la fabrique à la ville qui entreprend une grande campagne de restauration en 1979-1981. L’édifice est inscrit à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques le 31 décembre 1980, le chemin de croix l’est à son tour le 5 novembre 1982.
Malgré ces restaurations, force est de constater que cet édifice ancien, situé à l’origine dans les champs, subit d’une manière inéluctable les outrages du temps. Placé maintenant dans un environnement fortement urbanisé, à un croisement routier important, il est exposé aux rejets de gaz polluants de la circulation automobile. Il s’agit de nos jours du plus vieil édifice religieux de la cité. La déchristianisation de nos sociétés, l’abandon du culte des saints suite aux réformes de Vatican II, la disparition d’une dévotion populaire souvent décriée, expliquent en grande partie la situation actuelle.
À nous aujourd’hui de réfléchir au devenir de ce témoin de la piété de nos ancêtres. Il n’est pas nécessaire d’aller très loin pour trouver des exemples réussis de mise en valeur de chapelles anciennes : Sainte-Catherine de Hombourg ou Sainte-Croix de Forbach en témoignent. Mais leur situation est différente, puisqu’elles sont toujours la propriété des paroisses. Ce sont des lieux de visite et de prière appréciés des habitants et des touristes.
Le transfert du bâtiment à la ville, et son inscription, permettent certes de bénéficier d’aides publiques, mais ne règlent pas le problème de son entretien régulier, voire de sa réaffectation. Différentes solutions sont envisageables pour cela : il pourrait devenir le siège d’une association de quartier (à créer), un lieu d’accueil de groupes de réflexion ou de groupes de prière, éventuellement encadrés par la paroisse, ou encore un dépôt lapidaire qui permettrait notamment de mettre en sécurité et en valeur les statues de la Vierge et de saint Jean, exposées à de nombreuses dégradations (pollution, climat, graffitis).
D’autres solutions encore sont sans doute à imaginer, mais l’important est d’agir vite !
Le chemin de croix. La Piéta occupe une position centrale. Thème caractéristique de l’art médiéval de la fin du Moyen Âge, elle évoque « Jésus détaché de la croix ». De très belle facture, elle a été réalisée au début du XVe siècle.