L’école de la Mertzelle d’après une photo de 1918

Les écoles de Saint-Avold de la fin du Moyen-Âge au début du XXe siècle.

Extraits de l’article de Madeleine et Nicolas Provot paru dans le “Cahier Naborien” n° 5

Les écoles de garçon.

De l’école monastique à l’école communale

Si on ne trouve la première trace d’un régent d’école à Saint-Avold qu’en 1429, on peut pourtant affirmer sans grand risque de se tromper, qu’une école existait déjà bien avant cette date. L’abbaye bénédictine de Saint-Nabor ne manquait certaine-ment pas à la tradition qui voulait que chaque monastère entretint une école. Destinées d’abord à la formation des moines et des clercs, ces écoles élargirent leur recrutement et admirent aussi des enfants qui ne se destinaient pas à l’état ecclésiastique. Le fait suivant prouve en effet que la première école naborienne dépendait bien de l’abbaye : en 1520, un différend opposa la bourgeoisie de la ville à l’abbé Nicolas de Saint-Nabor. Ce dernier avait déplacé l’école et fut contraint en 1522, pour éviter les frais d’un procès, de la bâtir dans un lieu moins éloigné du centre de la localité.

L’école dépendant à ses débuts uniquement de l’abbaye passe à la fin du XVIe siècle en partie sous la tutelle de la communauté des habitants de la ville. Il en sera ainsi jusqu’à la Révolution de 1789. Les décrets de septembre et de décembre 1789 ayant transféré aux pouvoirs civils “la surveillance de l’éducation publique et de l’enseignement politique et moral”, l’école devient l’affaire de la commune.

La place de la Mertzelle, siège de l’école de garçons pendant quatre siècles

La première mention de la maison d’école remonte à 1520. L’Abbé de Saint-Nabor “avait changé la maison d’école et y avait destiné une maison sur la montagne du Gansberg”. Mal lui en prit : les bourgeois naboriens prétextant que leurs enfants, en grimpant cette colline s’étaient blessés, portèrent plainte et “le Bailliage de l’Evêché de Metz à VIC cite l’Abbé pour répondre à cette plainte.” Le différend se régla en 1522 sous l’arbitrage du lieutenant bailli Evrard de Esch qui “ordonna que la maison serait bâtie au lieu où était le moulin de Rotmyl et que l’entrée serait vis-à-vis du four banal, ce que l’Abbé accepta pour éviter les frais d’un procès”.

Aucun document ne précise l’emplacement de ce moulin, ni celui du four banal. En ce qui concerne le moulin, il se trouvait évidemment au bord d’un cours d’eau : donc au bord de la Rosselle ou de la Mertzelle. On peut raisonnablement penser qu’il s’agit de la Mertzelle près des bâtiments de l’abbaye, c’est-à-dire sur la place de la Mertzelle actuelle. Les moines avaient en effet l’habitude, à cette époque, de disposer d’un moulin dans l’enceinte même du monastère ou à proximité immédiate. Ce qui renforce cette hypothèse, c’est que l’école de garçons est mentionnée comme étant située Place de la Mertzelle au début du XVIIIe siècle. En 1716, on procède à la réfection “de la maison d’école devenue masure entre la Mertzelle et les Bénédictins, à la ruelle allant aux religieuses”, réfection dont fut chargé Melchior Spinga, maçon à Saint-Avold. Il semble qu’il n’y eut pas d’autres transformations pendant tout le XVIIIe siècle.

Plan de 1836 montrant l’emplacement de l’école de garçons de la Mertzelle près de l’église

En 1833, le Conseil municipal se trouve placé devant un grave problème : le nombre des enfants qui fréquentent l’école de garçons ayant considérablement augmenté (entre 1820 et 1830 la population est passée de 3000 à 3500 habitants et la fréquentation s’est vraisemblablement améliorée), il y a urgence à agrandir l’école. En hiver 1830-1831, sur les 300 garçons inscrits, on n’a pu en accueillir, faute de place, que 240. Et encore, parmi les 150 qui apprennent à lire, il y en a qui n’ont pas de place assise ! Tout ce petit monde est parqué dans un local de 12 mètres sur 7 mètres, chacun disposant théoriquement d’un tiers de mètre carré d’espace vital et d’un mètre cube d’air.

On décide alors d’agrandir l’école par “l’addition d’un bâtiment à celui déjà existant”. Le nouveau bâtiment comprend :

  • trois caves, dont l’une pour l’instituteur, les deux autres étant réservées à la commune,
  • le rez-de-chaussée du nouveau bâtiment servant de logement à l’instituteur,
  • le rez-de-chaussée de l’ancien bâtiment, dont une partie servira de remise pour les pompes à incendie et une autre de prétoire pour la justice de paix,
  • les combles, dont une partie reviendra à l’instituteur et les deux autres à la commune,
  • le premier étage des deux bâtiments qui forme une immense salle d’école pouvant accueillir 350 élèves. L’ensemble ne connaîtra plus de changements quant à son aspect extérieur mais la distribution intérieure sera changée en 1843 puis en 1851. L’enseignement mutuel, qui exigeait que tous les élèves fussent réunis dans une même salle, sera abandonné et les garçons seront répartis dans deux, puis trois et quatre classes. Les cloisons seront rapidement installées et l’école de la Mertzelle ne connaîtra plus guère de transformations, tout au plus des travaux d’entretien et de consolidation.

La nouvelle école de garçons

En 1900, l’inspecteur des écoles élémentaires du cercle de Forbach rédige un rapport dans lequel la vieille école de la Mertzelle est décrite sous un jour peu flatteur. En 1902, la commune décide d’acheter l’immeuble du notaire Dufresne et le vaste terrain y attenant. Dès 1904, l’immeuble est aménagé en logements de service pour le personnel enseignant et les travaux de construction de la nouvelle école démarrent en 1907. Le 6 janvier 1909, la nouvelle école de garçons est inaugurée. Pierre Frisch, directeur, qui a été chargé de prononcer le discours inaugural, ne se doute pas alors que son nom restera attaché à cette école toujours en service.

Maison d’école inaugurée le 6 janvier 1909, actuelle école Pierre Frisch

Les écoles filles

L’école des religieuses bénédictines

Cette école, probablement la première destinée aux filles de Saint-Avold, se trouvait dans le couvent de l’Annonciation sur le Nonnenberg (actuellement rue de l’hôpital).

Lorsque, aux quatre religieuses du début s’en ajoutèrent d’autres en 1633 et du fait qu’elles étaient “bien logées et pourvues d’une subsistance honnête”, elles ouvrirent une école pour les filles “dans le corps de logis de leur maison, séparée des lieux réguliers”. Cette école fonctionna jusqu’au début du siècle suivant mais “faute de sujets” elle fut fermée pendant près de vingt ans.

En 1722, “augmentées en nombre”, les religieuses la rouvrirent à la satisfaction des bourgeois de la ville ; ceux-ci proposèrent du reste de payer annuellement quatre livres par enfant fréquentant l’école. La Supérieure refusa cette offre et l’enseignement continua à être gratuit. Par manque de religieuses ou peut-être simplement par manque de religieuse apte à tenir une classe, l’école fut à nouveau fermée en octobre 1746.

Une classe de filles fonctionne dans le bâtiment des garçons

L’école tenue par les religieuses resta-t-elle fermée ? Rien ne permet de l’affirmer. Toujours est-il qu’en 1750 Jean-Nicolas Klein, le maître d’école des garçons, “est obligé d’avoir une femme pour les filles, dans une chambre à part, à charge que les entrées et sorties seront différentes de celles des garçons”. Cette classe pour les filles fonctionnait donc selon toute vraisemblance dans le bâtiment de l’école de garçons à la Mertzelle. C’était sans doute encore le cas en 1777 lorsque l’épouse de Jean-Baptiste Klein est autorisée “à tenir une école publique pour l’instruction des filles qui sera tenue dans une chambre séparée des garçons”. En 1789, la responsabilité de l’instruction des filles revient aussi à la commune. Nous apprenons qu’en 1792 deux maîtresses s’occupent des filles, l’une allemande, l’autre française. Elles logent à l’hôpital où deux chambres reçoivent les écolières.

L’école communale de filles occupe des locaux loués par la commune

En 1807, l’école de filles est confiée à des soeurs enseignantes. La commune ne possédant pas de bâtiment pour l’y installer, loue successivement deux maisons à cet effet. La première, sise rue de Longeville (actuelle rue Hirschauer), appartient à la veuve Bernard Ermann qui la loue à la commune “moyennant un canon annuel de 120 francs” pour servir d’école de filles et de logement pour les soeurs institutrices. En 1820, le bail venant à expiration, le Conseil municipal décide de transférer l’école dans une maison plus spacieuse car les locaux ne pouvaient plus contenir tous les enfants qui fréquentaient l’école. La maison du drapier Jean-Nicolas Reinhard fait l’affaire. Elle est située rue de Hombourg (actuelle rue Poincaré). Le loyer se monte à 166 francs par an.

Construction d’une école de filles en 1825 rue des Anges

La location d’une maison d’habitation pour servir d’école aux filles était très vite apparue comme un pis-aller et ce pour deux raisons :

  • d’une part, le Conseil municipal déplore l’exiguïté et l’inadaptation de la maison où “les enfants au nombre de 200 (200 en 1821 et 250 en 1823) se trouvent entassées les unes sur les autres de manière à craindre des maladies”. Il constate aussi qu’il est impossible de trouver un local plus vaste et convenable.
  • d’autre part, le principe d’avoir à louer une maison pour servir d’école déplaisait à la Municipalité et celle-ci souhaitait, dès 1821, acheter un immeuble. Mais l’argent, le nerf de la guerre, faisait défaut.

L’année suivante, l’occasion se présente à la ville d’acheter une maison ou plus exactement un emplacement pour la construction d’une école de filles et du logement pour les soeurs enseignantes. Il se trouve rue des Anges, est bien situé “dans une rue peu fréquentée par les voitures et les chevaux”, en face de la maison curiale. L’emprise qui est de 132,72 m2 est jugée suffisante. Il s’agit d’une maison incendiée en 1817, elle appartient au Sieur Léonard qui est disposé à la vendre. Dans sa séance du 12 décembre 1823, le maire, après avoir rappelé que la ville disposait de fonds suffisants (3000 francs) obtient de son conseil d’acquérir cet emplacement en vue d’y construire l’école de filles. Une ordonnance royale en date du 31 mars 1824 autorise l’achat et sans perdre de temps le maire fait établir le plan et le devis. Les travaux sont mis en adjudication le 10 juillet 1824 et doivent être achevés pour la Saint-Jean 1825.

Construction d’une école de filles rue des Charrons

Très vite, l’école de la rue des Anges se révèle trop étroite pour le nombre toujours grandissant des écolières. En effet, dans sa séance du 25 juin 1843, le Conseil municipal constate que les trois salles situées au rez-de-chaussée et à l’étage contiennent ensemble 100 mètres carrés pour 230 enfants ce qui fait 0,43 m2 par enfant au lieu de 0,60 m2 qui est le minimum exigé. Le Conseil municipal envisage donc d’acquérir une vaste maison avec jardin sise rue des Charrons (actuellement rue des Américains) et appartenant aux héritiers Mangin. Cette maison est assez vaste pour loger les institutrices, les salles de classe et permet de créer une salle d’asile.

Une ordonnance royale de novembre 1846 autorise l’achat de l’immeuble. En 1847, on procède à la mise en état et les classes sont très vite transférées dans les nouveaux locaux. En 1851, la supérieure de l’école communale de filles demande l’autorisation de faire construire aux frais de la Communauté Sainte Chrétienne une chapelle au premier étage, d’aménager les combles ce qui permettrait l’installation de cinq nouvelles salles dont un dortoir pour les soeurs institutrices, une infirmerie, une chambre pour recevoir les notabilités de leur ordre, une autre pour la soeur converse attachée à la maison, une autre servant de décharge. Le Conseil municipal donne son accord. Dès lors, l’école de filles de la rue des Charrons a atteint l’aspect qu’on lui a connu pendant plus d’un siècle. Elle sera démolie au début des années 1960. A son emplacement se trouve actuellement l’immeuble de la Caisse Mutuelle de Dépôts et de Prêts.

Les écoles secondaires

Sous l’Ancien Régime déjà, il fut envisagé à deux reprises de créer à Saint-Avold un établissement d’enseignement secondaire sans que le projet aboutisse. L’ouverture d’une école nationale en 1791 puis d’un Pensionnat de jeunes filles vers les années 1829 resta également lettre morte. Il fallut attendre 1847 pour qu’enfin fût fondé le Pensionnat Sainte Chrétienne pour les jeunes filles. Dix ans plus tard, un collège privé pour garçons accueillit ses premiers élèves, mais son existence fut des plus éphémères. C’est alors que la commune prit elle-même le problème à bras-le-corps et qu’elle décida l’ouverture d’une école primaire supérieure.

Le pensionnat Sainte Chrétienne

Un arrêté du Préfet de la Moselle en date du 9 janvier 1829, autorise la demoiselle Rose Altmeyer, qui en avait fait la demande, à ouvrir un pensionnat de jeunes filles. Il semble que ce projet soit lui aussi resté sans lendemain.

Il faudra attendre l’année 1847 pour que sous l’égide des soeurs de Sainte Chrétienne cette idée se réalise enfin. Lorsqu’en 1847 ces religieuses remplacèrent à l’école communale celles de Saint Jean de Bassel, elles envisagèrent rapidement l’ouverture d’un pensionnat. Le Conseil municipal, considérant qu’il était nécessaire que la ville dispose “d’une institution plus élevée pour les filles” est favorable au projet.

D’abord peu nombreuses, les pensionnaires au nombre de 10 à 15, étaient logées dans le bâtiment de l’école communale de filles, les salles du rez-de-chaussée recevant les externes, les deux étages étant affectés au pensionnat et au logement des soeurs.

En 1857, la Congrégation de Sainte Chrétienne décide de construire un immeuble, non loin de l’école communale de filles et pouvant recevoir 50 internes. En 1858, le nouveau pensionnat est terminé et abritera les élèves et les soeurs enseignantes jusqu’en 1970, année de sa démolition. L’école connaît un grand succès et en 1867 elle reçoit 60 pensionnaires et 16 externes.

Le pensionnat des Sœurs de Sainte Chrétienne vers 1870

Ouverture d’une École Primaire Supérieure de garçons en 1861

Dans sa séance du 16 septembre 1861, le Conseil municipal décide la création d’une école supérieure destinée aux “garçons sachant déjà lire et écrire”. La direction devra être confiée à un instituteur sorti de l’Ecole Normale et pourvu du Brevet supérieur. Il est envisagé, en cas de succès, de lui adjoindre un second maître. Dans cette même séance, le maire est autorisé à passer un bail de trois ou six ans avec la veuve Bourgeois pour louer la maison, située rue de Hombourg, destinée à accueillir la classe et à servir de logement à l’instituteur.

Le premier instituteur chargé de cet établissement est Jean-Nicolas Godard. Cette École Primaire Supérieure (E. P. S.) devient très vite l’enfant chéri de la Municipalité d’autant plus qu’elle répond à l’attente de la population, donc de l’administration.

Dès la première année, elle rassemble une quarantaine d’élèves répartis en trois divisions. Comme ce nombre doit, à l’évidence, augmenter à la rentrée de 1862, on sollicite la nomination d’un second instituteur, sortant de l’Ecole Normale. En 1864, l’école primaire de garçons et l’École Primaire Supérieure fusionnent et sont placées sous la direction unique de Monsieur Godard. Après l’annexion de l’Alsace-Lorraine à l’Allemagne, les classes primaires supérieures sont supprimées.