L’Einseling aujourd’hui.

Un petit ouvrage de la ligne maginot : l’Einseling.

Extraits de l’article de Loïc GLAD paru dans le « Cahier du Pays Naborien » numéro 18

Historique de la ligne Maginot

Le 11 novembre 1918, l’armistice est signé, la guerre de 1914-1918 que l’on dit être la « Der des Ders » vient de prendre fin. Dès la signature du traité de Versailles, dans les états-majors français on parle de protéger les frontières nouvellement retrouvées. L’Alsace et la Moselle, territoires perdus durant le conflit de 1870 et « germanisés » durant cette période, reviennent dans le giron français.

Dès lors, les fortifications édifiées de 1874 à 1918, comme Verdun, Toul, Epinal, Belfort, s’en trouvent éloignées et surtout dépassées par les progrès réalisés dans les domaines militaires. L’Allemagne, invaincue militairement, a dû cesser les hostilités et demander l’armistice, pressée par sa population qui souhaite voir se dissiper les problèmes économiques qui sévissent dans leur pays et l’étouffent. Le traité de Versailles, restrictif et contraignant, ne vient alors que renforcer l’orgueilleux nationalisme et l’esprit de revanche qui règnent dans les milieux industriels et militaires allemands.

La France qui a perdu 1 400 000 hommes au combat, compte une population qui s’élève alors à 40 millions d’habitants contre 70 millions pour l’Allemagne. Ce déséquilibre démographique, auquel s’ajoute l’importance économique et industrielle du bassin lorrain, ne fait qu’accélérer l’idée de mettre en place un système de fortification.

Les discussions menant bon train parmi les hauts responsables de l’armée, deux écoles de pensées s’affrontent alors ; les partisans de l’ancienne et longue tradition militaire de fortification, préférant concentrer leur force en une arme défensive, et leurs détracteurs, adeptes d’une guerre de mouvement, prônant l’emploi massif des chars sur les champs de bataille. Le capitaine De Gaulle qui a écrit un livre sur ce sujet, a été au début également favorable à une fortification des frontières.

Les états-majors optent pour la première proposition, ce qui fait naître des divergences qui vont perdurer jusqu’à la guerre, entre partisans d’une fortification de campagne éparse rapidement édifiée et partisans d’une fortification permanente coûteuse et longue à construire. Après sept ans de tractations, d’études préparatoires, est créée en 1926, la Commission de Défense des Frontières (C.D.F.) qui rend peu de temps après un rapport concernant l’organisation, le fonctionnement, les caractéristiques, le tracé et également le coût de cette future fortification. L’idée principale et innovante qui en ressort est la construction aux frontières d’un système discontinu de fortifications puissantes ayant pour tâche essentielle, en cas de conflit, d’interdire les grandes voies d’invasion afin de permettre la mobilisation des armées du pays.

En 1927, après de nouvelles recherches et discussions, la C.D.F. concrétise la forme définitive de la ligne de résistance qui est dès lors constituée de gros ouvrages d’artillerie, de petits ouvrages d’infanterie, de casemates et d’abris, selon l’importance du secteur. En 1929, le projet de réalisation de la ligne fortifiée est encore affiné et s’établit comme suit :

  • la création de deux grandes régions fortifiées (R.F. de Metz et R.F. de la Lauter)
  • la défense des berges du Rhin
  • la défense des Alpes
  • la défense des secteurs de Belfort et de Saverne.

Aucune fortification n’est prévue le long de la frontière belge, car les états-majors français considèrent les Ardennes comme une barrière naturelle infranchissable, et parce que la Belgique, alliée, dispose de ses propres fortifications pour protéger ses frontières et par conséquent celles de la France.

C’est Paul Painlevé, ministre de la Guerre, qui prépare activement le dossier de la fortification des frontières jusqu’en 1929, date à laquelle il est remplacé par André Maginot, qui fait voter en 1930 les crédits nécessaires à la construction du système fortifié auquel il donne son nom. La ligne Maginot sort de l’ombre.

André Maginot à Frescaty le 10 juillet 1923.

La construction

C’est en 1927 qu’est créée la Commission d’Organisation des Régions Fortifiées (C.O.R.F.), organisme rassemblant des spécialistes du génie, de l’infanterie et de l’artillerie, chargé en une période limitée de la conception de la ligne de fortification (disposition sur le terrain, plan des ouvrages, définition de l’armement, …).

Quelques chantiers débutent déjà dès 1928, mais c’est surtout à partir de 1930 que l’essentiel des travaux est commencé ; ce sont les réalisations du premier cycle de la première urgence. L’inflation galopante et les restrictions budgétaires entraînent un déséquilibre entre les plans initialement prévus sur le papier et la réalité des réalisations sur le terrain. C’est ainsi que de nombreux projets prévus pour les premier, deuxième et troisième cycles sont reportés, modifiés, réduits ou carrément supprimés, durant la période allant de 1930 jusqu’à la fin du mandat de la C.O.R.F. en 1935.

À partir de 1934, l’arrivée des nationaux-socialistes au pouvoir en Allemagne et la montée du fascisme en Italie, entraînent un nouvel intérêt pour la fortification des frontières françaises. C’est ainsi qu’un prolongement de la ligne Maginot, appelée « Nouveaux Fronts », est réalisé dans le Nord, à l’ouest des Vosges, et dans le sud de l’Alsace.

A partir de 1935, dans un contexte international tendu (l’Allemagne décide de se réarmer, plébiscite de la Sarre, rétablissement du service militaire obligatoire, …) les travaux de construction de la ligne Maginot sont principalement confiés à la Main d’œuvre Militaire (M.O.M), c’est-à-dire à la troupe qui comble les intervalles qui ne sont pas encore fortifiés, par de faibles blockhaus. La section technique du génie, chargée d’étudier de 1936 à 1939 des types d’organisations de campagne simplifiées et la Commission d’Etude des Zones Fortifiées (C.E.Z.F.), créée en 1939 après le déclenchement des hostilités, essayent de pallier les manques de défense de certains secteurs, dus aux ajournements de crédits, par la construction d’abris et de casemates, certes moins puissants que les ouvrages C.O.R.F.

Le concept

La conception de la ligne Maginot est basée sur une série d’ouvrages fortifiés indépendants, de différentes tailles, situés à une dizaine de kilomètres de la frontière et que l’on peut classer selon certains critères, petit ouvrage d’infanterie ou gros ouvrage d’artillerie. Les ouvrages, construits d’après des plans types, possèdent chacun des particularités qui les rendent différents les uns des autres malgré les fortes similitudes qui apparaissent souvent aux yeux des novices.

Le principe de défense de la forteresse est basé sur l’orientation de ses blocs de combat qui opèrent par tirs de flanquements, c’est-à-dire qu’au lieu de faire feu face à l’ennemi, les organes de défense balayent les intervalles entre les ouvrages et donc se protègent mutuellement.

L’armement

La mission principale de la ligne Maginot est d’arrêter et de contenir une attaque-surprise ennemie, afin de laisser aux armées du pays le temps nécessaire pour se mobiliser, et non d’attaquer l’adversaire à partir de celle-ci. C’est pour cette raison que la forteresse n’a jamais été équipée d’artillerie à longue portée. Son armement est plutôt basé sur l’utilisation de canons à tir rapide qui permettent de façon précise d’établir un tir de barrage infranchissable.

En cas de combat rapproché, la forteresse dispose de canons antichars, de mitrailleuses, de fusils-mitrailleurs et de mortiers pour assurer la défense de son périmètre. L’édification du système fortifié nécessite dès le début la conception d’un armement spécifique, propre à chaque ouvrage, car, pour des raisons techniques, le matériel de campagne est inadapté à l’emploi dans une fortification permanente (exiguïté des infrastructures). La majeure partie de ces armes sont souvent disposées en jumelage, et placées sous tourelle à éclipse, ce qui permet à une arme de refroidir pendant que l’autre tire. Une cloche lance-grenades équipe de nombreux ouvrages, mais l’arme qui doit l’équiper est encore à l’étude en 1940 et n’est installée nulle part.

L’Einseling : un ouvrage pas comme les autres

Le secteur fortifié de Faulquemont est touché de plein fouet par les restrictions et les ajournements. Aucun gros ouvrage n’est présent sur un front de près de 80 kilomètres d’Anzeling à Bitche. D’après les plans du 19 mars 1932, le petit ouvrage de L’Einseling doit comporter trois blocs reliés par des galeries souterraines et disposant d’un casernement.

Carte de l’Einseling.

Au vu de plans initialement prévus, il s’avère que l’Einseling est fortement amputé dans sa structure et ses moyens de défense. Seul le bloc 1 est construit mais au prix encore de nombreuses modifications. Comme il a été expliqué antérieurement, le principe de défense de la ligne Maginot repose sur la disposition de ses blocs de combat placés sur les hauteurs des collines, afin d’être protégé des coups directs de l’adversaire et de pouvoir opérer des tirs de flanquement. L’Einseling, lui, est bâti sur le flanc de la colline face à l’ennemi, livré aux coups directs d’une éventuelle artillerie adverse. La raison en est très simple. Comme le dit si bien le général Albéric Vaillant, commandant du P.O. de l’Einseling de 1938 à 1940 : « L’Einseling est un ouvrage qui est sacrifié à sa tâche ».

Au 1er septembre 1939, l’équipage de l’Einseling comme tous les autres est en place dans l’ouvrage et se trouve sur le pied de guerre. Un tiers des hommes vient de l’active, du bataillon de Zimming (146e R.I.F.) situé à cinq kilomètres de l’ouvrage, un tiers provient des frontaliers, principalement du village de Bambiderstroff situé à deux kilomètres de l’ouvrage et le dernier tiers est issu de la réserve rappelée dès la fin août. Tout cela conformément à la mission de la ligne Maginot : couvrir la mobilisation contre une attaque surprise.

L’Einseling n’est pas un ouvrage de ligne Maginot de carte postale ou de publicité. Il ne dispose pas de souterrains immenses, parcourus par un « métro » et pourvus d’installations variées : cuisine, dortoir, foyer, mess, poste de commandement, infirmerie… Ouvrage monobloc inachevé, l’Einseling dispose bien d’un souterrain à 30 mètres sous terre, mais c’est un cul de sac boueux, simplement équipé de lavabos, d’un puits et d’une citerne de cinquante mètres cubes d’eau. Il n’y a pas de cuisine, les plats sont réchauffés au hasard des prises de courant sur des réchauds électriques. Il n’y a pas de médecin ni d’infirmerie ; seuls quelques soins sont délivrés par un infirmier dévoué, le R.P. Germain. Et comme il n’y a pas de poste de commandement, c’est une table disposée au pied de la tourelle qui tient ce rôle. Quant aux dortoirs, il n’y a que deux lits pour trois hommes. Théoriquement c’est suffisant, mais l’équipage y supplée par des hamacs en cas de besoin.

Les 66 hommes d’équipage vivent donc très entassés sur les deux étages supérieurs de l’ouvrage qui sont en outre inchauffables. Durant le rude hiver de 1939-1940, la température ne dépasse jamais les 10°. Il apparaît vite qu’un tel entassement rend l’ouvrage invivable si l’occupation des lieux doit s’étaler dans le temps. Un jeune mineur du Nord, le caporal Laurroy, convainc le sous-lieutenant Vaillant, commandant de l’ouvrage, que c’est « peu de chose » de creuser une fouille de 20 mètres au fond du puits afin d’y installer un dortoir. Le Génie fournit de grandes tôles ondulées et des techniciens, l’ouvrage des bras. Un véritable travail de Romains : l’ouvrage ne dispose évidemment pas d’ascenseur et la disposition de l’escalier ne permet même pas l’installation d’un système de poulie. La terre se remonte dans « des brancards à bras », kilogramme après kilogramme, par les 122 marches de l’escalier. Le 10 mai 1940, l’achèvement du travail peut enfin être célébré. Mais en raison de l’absence d’aération de la fouille, l’énorme effort dont l’équipage est si fier, ne servira à rien.

Singularité de l’Einseling : sa chape de béton est coulée en deux fois et non d’un seul bloc. Le soin apporté à boucher la fente ne trompe pas l’eau de pluie qui s’infiltre quand il pleut très fort. En 1938, au cours d’une manœuvre sous l’orage, le colonel Milon, venu s’abriter dans l’ouvrage, en sort dégoûté d’avoir mouillé son képi et d’avoir dû patauger dans l’eau. Il déclare alors au commandant d’ouvrage médusé : « Je ne donnerais pas cher de cet ouvrage s’il devait être attaqué ».

Mais l’ouvrage est solide et l’équipage aussi. Inconfort et entassement n’ont jamais contribué à l’affaiblir. L’équipage est composé d’un tiers de Lorrains, d’un tiers de Parisiens et d’un tiers de « Ch’timis ». La promiscuité, bien sûr, ne va pas sans frottements, avec son lot d’incidents périodiques et de rivalités permanentes (sapeurs – fantassins, Parisiens – Lorrains, …), mais, en même temps, tout cela fait en sorte que les hommes se connaissent bien. L’équipage ne vit pas en couches hiérarchiques séparées les unes des autres, mais confondus les uns avec les autres dans le même inconfort. Il y a donc profondément une grande cohésion qui va se manifester encore davantage au combat.

De même, faute de casernement souterrain et d’espace, l’équipage prend l’habitude de vivre au-dehors. Le petit ouvrage est disposé de plain-pied avec l’extérieur, et c’est encore là que les hommes sont le moins mal. Ceci contribue beaucoup à ce que durant la période de combat, les sorties soient chose naturelle et non un événement exceptionnel.

Comme dans tous les ouvrages, chaque cellule de l’équipage est répartie en « quarts », dont un quart de veille qui est présent en permanence aux postes de combat. Le réveil se fait aux cris de « Branle-bas de combat ! » ; tout l’équipage doit alors courir à son poste. Le sous-lieutenant Vion, commandant en second de l’Einseling, vérifie alors le bon déroulement de l’opération et fait répéter au passage les consignes et réciter la formule rituelle : « Résister même isolé, même encerclé, même sans espoir de secours prochain, jusqu’à épuisement complet de ses ressources ».

Les soldats devant le casernement léger de la ferme Olmühle.

La « drôle de guerre », où l’ennemi devient aussi réel que le croque-mitaine, tourne en ridicule cette expression de « branle-bas de combat » et la « panique générale » qu’elle déclenche. Qui peut savoir cependant à quel point elle conditionne les hommes de l’équipage à l’étrange situation à laquelle ils seront confrontés bien plus tard ? Une fois ce rite accompli, suit la cérémonie « aux couleurs », puis la leçon d’éducation physique, après quoi il faut se creuser la tête afin de remplir la journée à coups de séances d’armement, de maniement de matériel, d’exercices d’alerte aux gaz, de tirs fictifs, … Le creusement des alvéoles est somme toute une ressource, mais combien pénible à ceux à qui elle incombe, et qui ne sont même pas dispensés de tour de veille. Finalement, l’Einseling, que ses voisins, les « vrais ouvrages » multiblocs, regardent avec condescendance, est un ouvrage très vivant, constitué de soldats très actifs, que la « drôle de guerre » ennuie fortement comme partout ailleurs, mais qui ne sont jamais démoralisés.

A partir du 10 mai 1940, le seul changement significatif au sein de l’ouvrage et ce jusqu’au 13 juin, est celui de la mentalité. Soudain la routine quotidienne cesse d’être une ennuyeuse comédie, tandis que le rythme d’existence reste inchangé. Comme à leur habitude, les officiers du sous-secteur échangent leurs opinions en suivant les événements militaires quotidiens sur une carte. Ils font alors du casernement léger de la ferme Olmühle un véritable « café du commerce ».Et c’est bien le cas, en ce 13 juin 1940, à la popote des artilleurs d’Olmühle, quand le planton Barbassous entre, lors de sa ronde, pour distribuer de grandes enveloppes jaunes. Elles ne sont même pas ouvertes tant le débat est animé sur la question : « Allons-nous vers la victoire ou la catastrophe de la Marne ? » Nul ne réalise la grandeur fatidique du planton Barbassous, qui n’est rien moins que le destin qui survient et rend cette discussion tout à fait futile. Que contiennent ces enveloppes jaunes ? : « Les troupes d’intervalles commenceront à décrocher dès le soir même ; les casemates d’intervalles se saborderont le 15 juin ; les équipages d’ouvrages resteront en place jusqu’au 17 juin ; une fois les sabotages effectués, ils s’efforceront si possible de rejoindre le gros des armées ».

L’équipage accueille l’ordre de sabotage dans un morne silence qui traduit stupeur, indignation, résignation et colère. Le 17 juin, il s’avère que les ponts sont coupés sur la Nied et que la Wehrmacht s’infiltre en force sur les arrières. Dans leur splendide isolement, les cinq ouvrages du secteur fortifié de Faulquemont, échelonnés tous les 2500 mètres, sont livrés au jeu de massacre par ouvrage successif, comme des têtes de Turcs à la foire. Situation que la Wehrmacht exploite tout de suite.

Au matin du 20 juin 1940, l’Einseling est le témoin impuissant du bombardement de son voisin le Bambesch. Non qu’il ménage ses tirs, mais l’Einseling ne dispose que de mitrailleuses qui tirent à 2500 mètres sur des cibles très incertaines. Comme le Bambesch n’arrive pas plus que l’Einseling à situer l’artillerie adverse, le sous-lieutenant Vaillant prend le parti d’envoyer en patrouille le caporal-chef Roy. En se portant vers le Bambesch, il doit repérer ces batteries. Il en revient sous des tirs d’armes automatiques mais en ayant rempli sa mission. Il a repéré deux emplacements aussitôt communiqués à la tourelle et au Bambesch. De fait, les tirs faiblissent puis cessent. Le Bambesch peut câbler vers midi : « L’attaque semble stoppée – dégâts insignifiants ». Ils croient avoir détruit des canons à coups de mitrailleuses. Tout au plus les ont-ils obligés à changer d’emplacement car l’après-midi, la sarabande reprend de plus belle, sans possibilité de repérage. C’est alors que vers 16 heures, l’équipage de l’Einseling peut voir distinctement sur le bloc de l’adjudant-chef Regis, l’assaut des pionniers que les mitrailleuses de l’Einseling n’incommodent guère à 2500 mètres. Leur apparition ne dure que quelques secondes. Le Bambesch se rend vers 18 heures.

Le 21 juin, l’Einseling est violemment pris à partie par l’ennemi tout comme l’ouvrage voisin du Kerfent. A 4 heures 30 un obus de 88mm s’abat de plein fouet sur la cloche cuirassée. Durant trois jours, l’ouvrage résiste et tire de nombreux coups de feu.

L’heure de l’armistice, le 25 juin 1940 à minuit 35, est annoncée à l’avance par la radio civile. Dans l’ouvrage, l’équipage a convenu que le dernier quart d’heure sera consacré à un tir de barrage général, de toutes les armes, pour brûler le plus de cartouches possible et en même temps pour manifester qu’il tient le dernier quart d’heure. À l’heure dite, le sous-lieutenant Vaillant ordonne le cessez le feu, répété en écho par toutes les équipes de tir. Cet ordre banal qui ne l’est pas ce soir-là, prend dans ces circonstances un aspect solennel. Le grand silence qui succède au vacarme, fait prendre conscience à l’équipage, qu’après l’extrême tension des derniers jours, leur vie tombe dans le vide et l’inconnu de la défaite.

Les soldats de l’Einseling au matin du 25 juin 1940